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  Interview Decembre 1995 The Vibe Magazine

  (
Traduit de l’anglais)

ELECTRIC HEAD '95

 Quelques heures avant le concert dévastateur de White Zombie, j'ai eu la chance de parler avec leur guitariste J. originaire de Chicago. L'interview s'est déroulée dans sa chambre d'hôtel, à deux kilomètres de la salle de concert. Voici les points importants de notre conversation.

Laisses-moi mettre en route le magnétophone, car le sujet dont on va parler est un sujet que je voulais évoquer, un jour ou l'autre! Donc c'est votre deuxième tournée pour la promo de "Astro Creep: 2000, Songs of Love, Destruction and other Synthetic Delusions of the Electric Head", c'est bien ça?

J: Oh oui, c'est la deuxième tournée. On va jouer en Amérique du sud quand on reviendra et qu'on fera le sud des Usa. Actuellement on termine le nord. C'est non-stop, sans-fin, la tournée passe partout jusqu'en mars puis on ira au Japon.

Et à propos de l'Europe?

J: A ce moment je ne sais pas, on a fait des festivals la bas, on a fait Reading, on a joué à Donington avec Metallica, Skid Row, Slayer...

Oh oui, pour celui avec Metallica vous avez joué deux nouveaux morceaux, j'en ai vu un enregistré sur un bootleg!


J: A vraiment?! Déjà?! Ah Ah, les gens sont fous, peut-être qu'au moment de la sortie de l'album ces morceaux seront complètement différents.

Vous avez également joué ou en Europe?

J: On a fait une grosse tournée des festivals avec le package Soundgarden, White Zombie, Mahogany Chaos, Sponge, Pennywise et Blind Melon...

Ou les retours pour White Zombie sont les meilleurs, en Europe ou aux Etats Unis?

J: En Amérique, bien sur. C'est bien plus gros, on y est plus populaires que n'importe ailleurs. Je veux dire qu'on a été jouer en Australie pour quelques concerts, et les jeunes étaient les mêmes que ceux en Amérique. Pour l'Europe ça dépend, chaque pays est différent. Les festivals sont supers, avec des milliers de spectateurs, c'était cool et tout, mais on a jamais joué en tête d'affiche pour une tournée ici. On le fera peut-être plus tard, mais je ne saurais dire quand.

Vous aimez les petites ou les grandes salles?

J: J'aime jouer dans les deux. L'idée d'une grande salle est d'avoir autant de gens que possible, et de donner l'impression d'être dans un club. Ca dépend aussi de la musique que tu joues.
 



HEAVEN PHANTASMO SUPERCHARGERS
 

Comment décrirais-tu votre musique? Vos anciens morceaux seraient plutôt qualifiables de "heavy metal extrême", et pour les nouveaux?

J: Les anciens morceaux? C'était asez psychotique et grungy. Pour les morceaux vraiment vieux, je ne sais pas... Et je ne sais vraiment pas comment classer ce qu'on fait maintenant. Les gens disent des choses comme "Death metal funky" et des trucs comme ça (Rires), c'est vraiment le but de créer le groupe que tu aimerais voir. On a toujours été d'accord là dessus avec les autres membres du groupe: Et si on faisait un gros show à la Kiss, Iron Maiden ou Alice cooper, avec plein d'explosions, ce qui est gros et stupide, mais en essayant de le rendre plus intelligent, comme Sonic Youth... Et puis si on avait l’énergie des Bad Brains ou de Black Flag? Et si on ajoutait des samples hip hop? Le but est d'essayer de créer ce qu'on voudrait vraiment voir.

Vous n'avez jamais eu de clavieriste/ sampler permanent dans le groupe, mais depuis les 4 dernières années vous utilisez des samples. Ca n'est pas un peu étrange?

J: Et bien, oui, sur le disque il y avait Charlie de Nine Inch Nails. En concerts notre ingénieur du son Charlie s'occupe des samples. Mais c'est toujours cool quand le groupe n'est composé que de 4 personnes.

Je suis d'accord, en 1995 White Zombie semble être un groupe bien en place.

J: On vient à coup sur de la période "Do it yourself" des années 80s. Je pense qu'on tire une grosse influence de la façon dont les groupes faisaient dans les années 80. Tu jouais de la musique car c'était une chose cool à faire, et que tu aimerais ça, sans penser que tu te ferais beaucoup d'argent, et tu aurais même pu bien avoir la dalle... Maintenant c'est différent, tu peux créer un groupe, et te retrouver sur MTV en six mois, et vendre des millions d'exemplaires. L' attitude "Do it yourself" n'existe plus. Les gens ont des motivations bien plus vénales. Certains nous disent qu'on est fous de remettre autant d'argent dans l'aspect visuel/ spectacle des concerts, afin d'en faire un gros show, mais je pense que c'est important car c'est ce que les gens veulent voir. Ils aiment les gros shows.

Tu penses que vos concerts ressembleront à quoi en 1997? Tu peux faire des prédictions?

J: On ne prévoit jamais les choses à ce point. En ce moment on est en concerts, et quand on aura terminé on retournera chez nous pour commencer à bosser sur le nouvel album, puis alors sur le côté "show" des concerts. Ca s'est passé comme celà pour "Astro creep 2000" également. On est pas à l'aise pour composer en tournée. On a quand même pu faire quelques trucs en tournée, comme la reprise de Black Sabbath "Children of the Grave" pour l'album tribute, et également 'Fear of the Gods" pour la B.O.F de Airheads, mais c'est vraiment difficile pour nous d'écrire durant les tournées. On aime plutôt composer comme un groupe: Nous retrouver dans une pièce, mettre tous les amplis très forts et jouer. On ne peut pas faire ça sur la route ou dans une chambre d’hôtel.
 

     

*** BLUR THE TECHNICOLOR ***


Peux tu nous donner des raisons pour le fait que le calendrier du groupe soit si chargé?

J: (Relfexion)... Euh... Prends cette année par exemple, on a sorti un album qui est devenu multi-platine. Quand j'étais gamin, les premiers disques que j'ai achetés furent ceux des Ramones et des Cramps. On a eu la chance de jouer avec chacun des deux cette année, des groupes qui m'ont fait acheter une guitare. Ce soir on joue au Rosemont Horizon, c'est l'endroit ou j'ai vu mon tout premier concert quand j'avais onze ans. Je n'ai vraiment pas envie de ralentir actuellement, car tout ce qui se passe est vraiment bon.

Pour toi la musique est-elle un échappatoire?

J: Oui, c'est le cas. Quand je ne suis pas en tournée et que je bosse avec le groupe sur des nouveaux morceaux, je rentre chez moi et me relaxe en jouant de la guitare pour trois ou quatre heures. Je regrette de ne pas avoir commencé à jouer de la guitare quand j'avais cinq ou six ans, je serais un bien meilleur guitariste maintenant!

Vous n'êtes pas fatigués par ce calendrier de tournées et d'enregistrements très chargé?

J: Ce n'est pas dur pour moi de vivre dans des beaux hôtels et de voyager dans des bus luxueux ou de voler en avion. Ce n'était pas dur pour moi même quand on avait la dalle et qu'on dormait un peu chez n'importe qui après les concerts. D'un autre côté, je sais que c'est un peu cliché, mais nos fans sont vraiment cools et les concerts font que ça vaut presque toujours le coup de se casser le cul. Quand je joue un morceau que j'ai déjà fait 500 fois, si l'audience est dedans, c'est super. Cette fois on a également un gros break entre les deux tournées, ce qui rend les choses encore plus faciles. Tu vois, la première fois ou l'on a joué en Europe, c'était en 1989, on vivait dans des squats ou dans notre tour-bus. Notre label nous donnait trois dollars par jour pour subsister, trois putains de dollars pour acheter de la bouffe chaque jour! Maintenant c'est bien mieux, ce n'est pas stressant, ou ça l'est autant qu'un travail classique. Je ne me plains pas.

Es-tu impliqué dans la partie business de White Zombie?

J: On l'est tous à des degrés différents depuis l'époque ou on était un groupe indépendant underground. On faisait nos propres t-shirts, organisions des concerts et tout le reste; Maintenant Rob s'occupe de tous les visuels de Tshirts et dirige les vidéos. On avait beaucoup de choses à faire!

Quelle différence ferais-tu entre l'époque de "La sexorcisto" et celle d'Astro creep?

J: Oh, c'était très diffèrent. On avait enregistré "La sexorcisto" quand on était à New York, on était très justes niveau tunes. On bossait chaque jour, un travail classique, et on a été en studio pour enregistrer l'album presque en live. Mais pour le dernier, on avait joué avec tous ces groupes de heavy intenses, et on vivait à Los Angeles, ce qui était très différent.
 

CREATURE OF THE WHEEL '95
 

Quel genre d'influence l'année 1995 a eu sur toi?

J: Hmmm...Je trouve que sur le nouvel album j'ai eu un jeu moins métal et un peu plus ouvert. La musique est plus sèche, plus énergique, mais je pense que ça vient plus du fait d'avoir joué dix ans ensemble. C'est aussi plus groovy. La plus grosse influence est peut-être la technologie. On avait beaucoup plus de possibilités en bossant dans un studio sympa. On a aussi eu cette nouvelle possibilité en bossant avec Charlie, ou on peut en faire beaucoup plus avec les samples, les boucles et les percussions. Tout a commencé avec les samples sur "La sexorcisto", mais ça s'est bien amplifié avec le dernier album, tu sais, comme avoir un sample à la place d'un solo de guitare.

Si je compare Astrocreep avec vos efforts studio précédents, il a définitivement un côté plus riche et plus agressif. Sans aucun doute c'est un gros pas en avant, mais je dois souligner le point que la production est également bien meilleure!

J: Ce fut un album difficile à réaliser. C'était un enregistrement de 72 pistes, 48 analogues et 24 digitales, ce fut dur!

Mais ou avez-vous utilisé toutes ces pistes?!

J: (Sourires) Tu as quelque chose comme cinq pistes de vocaux, puis huit de guitares, et alors une douzaine de parties batteries, et puis tu dois garder des pistes pour les samples que tu ajoutes et enlèves. On avait deux studios, un pour bosser les parties guitares, l'autres pour les samples, donc les cassettes faisaient tout le temps des aller-retours. Ca a pris presque six semaines pour terminer l'enregistrement et la production de l'album. C'était cool d'avoir plus de temps à passer en studio, avec le premier disque pour Geffen on devait compléter l'album aussi rapidement que possible et sortir du studio pour aller en tournée... Cette fois on avait un budget beaucoup plus gros et plus de liberté niveau durée.

Le prochain sujet sera vos textes. Quelle importance donnes-tu à ceux ci? (Rob Zombie en fait la plus grosse partie)

J: Je n'aime pas les textes qui t'imposent des idées. Ceux de Rob sont plus comme le fait de lire un livre de William Borroughs, leur but est de te faire réfléchir, et ils sont également très abstraits. Comme guitariste, les textes sont très importants car ils contrôlent et dirigent la structure globale du morceau.

Il semble aussi y avoir beaucoup d'imaginaire à ce niveau.

J: Ouai, on est tous fans des films de série B, de comics et de science fiction, c'est vrai et ce n'est pas juste une rumeur! Par exemple, Bladerunner est un de mes films favoris.

Quel sens prendra la scène musicale des années 90 à ton avis? Que prédis-tu?

J: Je crois qu'il y aura un gros changement, tôt ou tard. Les gens commencent à en avoir marre de tous ces groupes alternatifs, ils se ressemblent tous niveau musique et visuel. Les media sont également devenus une partie de la grosse machine.
 

// BLOOD, MILK AND SKY //
 

Crois-tu que les medias ont un effet négatif ou positif sur la musique de nos jours?

J: Les deux, et c'est amusant. Regardes comme l’Amérique est grosse. Les médias ont un effet positif car un gamin qui vit dans le sud de l'Illinois peut regarder la TV et se sentir aussi cool qu'un autre vivant à New York. C'est une bonne chose, ils amènent la musique partout. Prends notre cas par exemple, on a joué dans ces endroits fous ou on aurait jamais pensé aller un jour. On a joué dans le Dakota du nord et le concert était annoncé à la TV! C'était le premier gros concert rock à cet endroit depuis que Metallica avaient joué pour "...And Justice for All" en 1988. D'un autre côté, certains médias encouragent la fadeur et retirent le côté fun de la musique. Ils retirent de la spontanéité des concerts, les gens ne savent pas comment réagir à certains endroits, ils pensent qu'ils sont en train de regarder la TV. Certains médias pourraient également faire plus dans l'éducation musicale, et plus promouvoir la musique...
Pour revenir à ta question initiale, je pense que les choses vont virer dans une autre direction vraiment rapidement, car tous les gens auxquels je parle en ont vraiment marre de tout ce truc. Tout le monde!

Est-ce que tu pourrais développer ce point?

J: Tu vois, je pense à ces groupes alternatifs farfelus qui débarquent avec un morceau un peu rigolo, et ils ont du succès pour un très bref moment, puis un autre arrive juste après et prend leur place, puis encore un autre, et ça continue sans arrêt. Les gens en ont marre de ce truc. De toutes façons, c'est ce que je pense, et le temps prouvera qui a raison ou qui a tort.

Tu as dit que les gens allaient se lasser de la musique alternative un jour ou l'autre. Qu'est-ce qui pourrait être la prochaine grosse étape pour la musique à ton avis?

J: C'est juste un pressentiment, et j'ai souvent raison. A la fin des années 80 j'avais ce sentiment que la musique underground/ alternative allait finalement exploser pour devenir très grosse. J'ai toujours eu le sentiment que dans la musique que j'écoutais en étant gamin (Des choses comme les Ramones par exemple) même s'il y avait une saturation sur les guitares, c'était de la pop... Je me demandais pourquoi ça n'était pas aussi populaire que Duran Duran car je connaissais des gens qui auraient aimé.
Maintenant c'est Green Day, donc mon rêve est en quelques sortes devenu réalité. Je pense que le métal reviendra en quelques sortes, mais je ne pense pas que ça sera exactement la même chose.

Tu penses vraiment? Le métal est toujours populaire en Europe, pas autant qu'à une époque mais quand même assez...

J: Je pense que la nature du métal est qu'à chaque fois un groupe le mènera à des nouveaux extrêmes. Comme il y a eu Motorhead, puis Metallica, et alors Venom, Slayer, Napalm Death, Deicide... Cannibal Corpse, Impaled Nazarene, Mayhem, le plus bruyant, tu ne pouvais pas être plus puissant. C'est pour ça que le métal éclate en toutes ces choses, certains groupes deviennent plus punk, d'autres se mettent à l'industriel. Quand le style reviendra, ça ne sera pas une nouvelle fois une opposition entre le glam et le thrash, ça sera quelque chose de nouveau et béton mais ça sera toujours puissant.

La scène alternative actuelle est en quelques sortes venue du métal, tu ne penses pas?

J: Je pense que tout influe sur le reste, et vis versa. Les musiciens écoutent rarement exclusivement ce qu'ils produisent. Le Hip hop fut une grosse influence sur nous car il nous a appris beaucoup de choses. Quand Public Enemy ont débarqué, ce fut vraiment puissant, épais, du terrorisme sonore, du bruit sur lequel tu pouvais danser. Il y avait aussi un message. Ils avaient inventé un tout nouveau style de musique et c'est quelque chose qui m'a beaucoup influencé.

Public Enemy... Ces gars ont eu un gros impact sur tellement de choses! J'entends toujours des musiciens qui en parlent comme influence...

J: A cette époque le Hip hop était bien plus passionnant que ce qui se passait dans le rock. C'était une sorte de punk rock noir, vraiment immédiat, honnête et aventureux.

Pourquoi penses-tu que la musique heavy soit toujours si populaire?

J: Car la musique heavy est vraiment énergétique, une grosse partie est vraiment violente, je pense que c'est un exutoire aux mauvaises énergies que le gens ont naturellement. Ecouter un disque de Slayer te donnes l'impression de conduire très vite, de sauter en parachute, c'est juste un feeling diffèrent. Ton adrénaline monte d'un coup!

(Appel téléphonique. J va répondre alors qu'on discute de la médiocrité commerciale du dernier album de Megadeth)

"Salut... Maintenant?... Qui doit jouer maintenant? Ils ne peuvent pas atterrir??!!!" Et il se tourne vers moi: "Soul Asylum doivent jouer et ils ne peuvent pas atterrir!"
De retours vers la personne au téléphone "... Vache sacrée! Okkk... Qui joue maintenant? Silverchair à 6:40, Porno for Pyros à 7:40, Alanis Morissette à 8:30, Oasis à 9:30, White Zombie à 10:30 et ... C'est tout? Donc à quelle heure on doit partir?

Pour moi le moment était déjà venu de le remercier pour ses réponses, de marcher à l’extérieur dans dix centimètres de neige, et de repartir en voiture.