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04/07/2009

PRONG - Interview 1994 (Metal)



NON! LE METAL-HARDCORE DE NEW YORK N'EST PAS MORT! PRONG EST TOUJOURS LA EN 93, AVEC SON CINQUIEME ET MEILLEUR ALBUM, "CLEANSING". LE GRAND NETTOYAGE QU'EVOQUE LE TITRE CONCERNE AUTANT LA TETE DE TOMMY VICTOR, CHANTEUR/ GUITARISTE DU GANG, QUE LA MUSIQUE DE PRONG, ENCORE EPUREE POUR PLUS DE PUISSANCE. ATTENTION, ÇA DEPOTE !

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Depuis la sortie de "Prove You Wrong" en septembre 91, tout juste un petit concert parisien et puis plus rien! Pourtant, il s'en est passé des choses... En plus de la tournée, Prong a sorti l'an dernier un maxi cinq titres intitulé "Whose Fist Is This Anyway?" (Nom d'un des titres du nouvel album par la même occasion), essentiellement composé de remixes techno-industriels. N'étant pas sorti en France, nous n'aurons malheureusement que la possibilité de fouiller les bacs import. Ensuite, Troy Gregory, le bassiste, a quitté le groupe, et enfin, Prong a pu se remettre à composer. Mais voyons tout cela en détail avec Tommy, de passage à Paris avec son batteur Ted Parsons pour tout dévoiler sur le contenu du nouvel album "Cleansing"...


Metal Attitude : Tu as récemment déménagé loin de New York. Ça ne pose aucun problème pour le groupe que vous soyez maintenant disséminés?!

Tommy Victor: J'espère que ça n'en posera pas! Là où je vis maintenant, la vie n'est pas très chère, ça n'a rien à voir avec New York en tout cas! Ted (Parsons, batteur) est resté à Brooklyn, tandis que notre nouveau bassiste, Paul Raven, habite à Toronto et John Bechdel (sampler) à Jersey City ! Mais je peux très bien venir à New York chez des amis pendant quelques semaines pour répéter... Et pour le prochain album, on va certainement louer une maison quelque part aux States et tout faire sur place, loin du reste. Le prix de la location d'un petit local à New York pour une journée nous permettrait sans doute de louer une grande maison à la campagne pendant une semaine!

Vu sous cet angle, évidemment ... Mais revenons quelques mois en arrière et raconte-nous pourquoi Troy Gregory a lui aussi quitté le groupe, après avoir remplacé à la basse Mike Kirkland sur le précédent album "Prove You Wrong"?

Well, Troy avait pris un très bon départ dans Prong, il était motivé et très enthousiaste. Mais ça a vite tourné court quand on a commencé à tourner beaucoup et à travailler intensivement. Troy n'était pas un gros bosseur et il avait pas mal de problèmes dans sa tête. Même quand nous avions enregistré l'album, il n'était venu en studio que quatre jours, juste le temps de faire ses parties de basse. Sa meuf lui manquait, il ne pouvait rien faire sans être mal, il était un peu cinglé, franchement! Il a fini par se droguer de plus en plus et il n'arrivait plus à faire face aux choses. Une fois, on a eu un petit accident avec notre van et il est devenu à moitié fou, prétendant qu'il avait failli mourir, etc! Pour clore le tout, il a eu un problème à la main qui l'empêchait de jouer correctement, déjà que c'était limite quand il n'avait rien! On ne pouvait donc pas l'emmener avec nous en tournée et c'est alors qu'on a parlé de l'histoire à Paul Raven. On avait essayé d'autres mecs, mais aucun n'aurait pu faire mieux l'affaire que lui. On l'avait déjà rencontré auparavant, il savait qu'on était de grands fans de Killing Joke et il a, de son côté, acheté les disques de Prong qu'il a appréciés.

Vous aviez même déjà travaillé avec lui sur le maxi six titres "Whose Fist Is This Anyway?" sorti en avril 92 (uniquement en import en France)...


Oui, il s'était effectivement chargé de quelques remixes sur ce mini-album... Suite à ça, je lui avais fait parvenir une cassette-démo du nouvel album. Il l'a bien aimée et il a tout de suite réfléchi à certains arrangements qu'il serait possible d'apporter.
  
 
Mais il n'a donc pas participé à l'écriture de "Cleansing"...

Non, en effet. Mais outre la basse, il a arrangé certains titres et il nous a aidés à mieux cerner la direction que nous souhaitions prendre.

Et qu'en est-il de John Bechdel, ex-Killing Joke lui aussi, crédité aux samplers ?


Il nous a effectivement aidés en studio et finalement, il nous accompagnera sur la route également. Il fait des tas de samples, y compris des samples de guitares, qui viennent enrichir l'ensemble de notre musique.

N'as-tu jamais pensé qu'il pourrait être dangeureux d'intégrer deux anciens membres de Killing Joke à ton équipe? Cela pourrait tourner au détriment de la personnalité propre de Prong ...

Non, car après tout, le chanteur et le guitariste de Prong sont toujours les mêmes, puisque c'est moi, ah ah! D'autre part, j'ai toujours été très influencé par Killing Joke, aussi je ne crois pas que ce soit réellement un danger. Même si on devait sonner un jour exactement comme Killing Joke, je n'y verrais quasiment pas d'inconvénient tellement j'adore ce groupe! Ils sont sans problème ma plus grosse influence.

Quels autres groupes citerais-tu parmi ceux qui ont bercé ta jeunesse?...

Bad Brains, Gang Of Four, Metallica, Chrome... Quand Metallica est arrivé, ils ont créé une véritable révolution dans le monde du metal, par leur attitude surtout. Tout le monde s'est alors mis à les copier, nous comme les autres! On a ajouté à cela un peu de Sonic youth, de Killing Joke, et de Swans bien sûr, j'allais les oublier (Ndj: Swans est l'ancien groupe de Ted Parsons, qui faisait de l'industriel bien avant l'heure!)...

Retournes-tu de temps en temps au CBGB (Célèbre club new-yorkais où se sont produits tous les groupes de hardcore de la grande époque), où tu as travaillé au son pendant plusieurs années avant Prong?

J'évite de mettre trop souvent les pieds là-bas parce qu'à chaque fois, les mecs m'offrent des tas de coups à boire et je repars dans un état lamentable, ah ah! Surtout que maintenant, je suis sensé ne plus boire du tout, je ne fume plus non plus et je ne prends aucune drogue. Le vrai mec clean, quoi!!! Par contre, je n'ai jamais été aussi nerveux qu'en ce moment, je me bouffe les ongles jusqu'à l'os!



Le nouvel album "Cleansing" est très compact, très puissant, et surtout moins haché qu'auparavant. Etiez-vous plus sûrs de vous d'une manière générale ou avez-vous particulièrement travaillé dans ce sens?

Oui, nous étions très concentrés sur les morceaux. On a écrit les chansons et fait de notre mieux concernant les arrangements et la production. Nous ne cherchons à rentrer dans aucun créneau particulier du marché, ça n'a d'ailleurs jamais été la démarche de Prong malgré tous les problèmes que nous avons eus. Le concept de "Cleansing" visait en partie à éviter tout excès dans les morceaux. On avait décidé de se concentrer avant tout sur la cohésion des titres, sur leur impact et sur leur son

Justement, Cleansing signifie "nettoyage"! Est-ce un concept purement musical ou cela va-t-il plus loin?

Ça va plus loin en effet puisque les textes des morceaux ont été également écrits dans cet esprit. J'y parle beaucoup de purification personnelle, du fait de sortir de toutes ses influences et de simplifier sa vie au maximum...

Pour en revenir au son de l'album, vous avez cette fois abandonné le producteur Mark Dodson au profit de Terry Date. Quel était le problème avec Mark?

Well, on n'aimait pas le son du dernier album, Prove You Wrong. On trouve qu'il a enlevé beaucoup de puissance à cet album, pour nous donner un son trop stérile. Par exemple, on partait sur une certaine idée pour un morceau et on le répétait donc comme on l'imaginait. Puis une fois en studio, à la dernière seconde, Mark Dodson décidait que ça ne lui plaisait pas et qu'il fallait chanter comme ci plutôt que comme ça, etc ... Il baissait systématiquement le son des guitares, bref, il voulait qu'on sonne comme un groupe de pop! Nous n'avions pas un gros budget pour l'enregistrement et nous n'avons donc pas pu retourner en studio pour réparer ces erreurs. On s'est assis dessus, mais on était bien décidés à ne pas recommencer avec "Cleansing", que nous avions déjà en tête de manière très précise avant d'enregistrer.
Avec Terry, nous avons passé beaucoup plus de temps qu'avec Mark à choisir les sons, mais après ça, on est allés assez vite et Terry s'est avéré très efficace, il va directement au but. Grâce à Terry, les fans de metal vont sans aucun doute beaucoup apprécier l'album, et les fans d'indus s'y retrouveront eux aussi.

Justement, suite au maxi précédent, on pouvait croire que vous alliez carrément virer à l'industriel, ce qui n'est pas du tout le cas puisque "Cleansing" est même étonnamment metal...

C'est vrai, mais nous avons dans l'idée de continuer ce système de remixes qui nous permet d'aborder plusieurs facettes du problème. A l'occasion de la sortie des singles par exemple, on va inclure des versions techno ou industrielles de nos morceaux. Les deux premiers seront "Snap Your Finger ... " et "Broken Peace". Si on en sortait trois ou quatre autres, ah ah ! On pourrait ressortir un disque avec toutes les nouvelles versions!



Attends-tu de ce disque qu'il vous mène enfin au succès ou est-ce une notion qui t'est toujours étrangère?

Je n'attends plus rien du tout. J'essaie d'espérer le minimum de choses possible. Tu t'aperçois un jour qu'il vaut mieux être négatif parce que dans le cas contraire, tu t'exposes à des déceptions permanentes. A quoi ça sert de prétendre partout que le groupe va devenir énorme avec cet album si ça tourne en réalité au flop total?! Je ne pense donc pas au succès, je me contente de faire mon travail, à savoir sortir le meilleur album dont je sois capable. Je reste honnête avec moi-même et je pense faire ce qu'il faut pour le groupe, la preuve, je suis en tournée promotionnelle européenne en ce moment même. Mais tout cela ne sert pas à grand-chose ... Les journalistes ont déjà, pour la plupart, une opinion préétablie à ton sujet, avant même d'avoir écouté le nouvel album. Surtout aux Etats-Unis, les critiques n'écoutent même pas les disques, ils se font une certaine idée de ton groupe et ils s'en tiennent là! Ils n'en ont rien à foutre, ils aiment ce qu'il est bon d'aimer pour leur image! Quant au public, il décide lui -même ce qu'il a envie d'écouter, tu ne peux rien faire de plus que lui proposer tes disques et venir jouer régulièrement.

T'exerces-tu encore sur ton instrument?

Non... Je ne joue que dans le cadre de Prong. Je laisse les choses venir naturellement, j'ai l'impression que mes idées seront meilleures dans la mesure où j'ai l'esprit totalement libre par rapport à l'instrument. Je préfère me concentrer sur la composition des morceaux que sur la technique pure. Je ne suis pas un vrai guitariste de toutes façons... Ce sont surtout des idées que j'ai envie de transcrire, pas des notes que j 'ai envie d'aligner. A chaque fois que je prends ma guitare, je finis par me mettre à composer, pas à faire des gammes! Pour "Cleansing", j'ai écrit 40 chansons, avec les paroles et tout... Elles sont même enregistrées sur des démos. Si on voulait, on aurait donc encore de quoi sortir trois albums! En tout, j'ai dû écrire plus de 150 titres pour Prong, mais je n'utiliserai jamais ceux qui ne sont pas sortis. On les a écrits, on les a abandonnés parce qu'ils n'étaient pas assez bons, on n'y reviendra pas.

Quand peut-on vous espérer en Europe?

Pas tout de suite... Nous allons commencer par tourner aux Etats-Unis, donc on ne viendra certainement pas avant le printemps.

Patience... Mais en attendant, vous avez largement de quoi vous délecter avec "Cleansing", qui est sans aucun doute le meilleur album de Prong à ce jour. II est suffisamment rare qu 'un groupe évolue dans le bon sens en vieillissant pour qu'enfin, vous leur accordiez la faveur de leur prêter une oreille plus qu'attentive... On compte sur vous, votre discernement et votre bon goût!





+ + + CLEANSING ---:

"Another Worldly Device"
Ce titre parle de la façon dont on doit simplifier sa vie pour se trouver. Si on veut vraiment être soi-même, il faut se débarrasser de toutes les influences qui ont marqué notre vie, dans tous les domaines. C'est là aussi ce même concept du "nettoyage", dans le sens "purification".

"Whose Fist Is This Anyway?"
Cette chanson dit que les gens sont trop enclins (A mon goût) à croire en permanence que des complots se jouent contre eux. Je n'y crois pas... Si tu veux vraiment arriver à faire quelque chose, tu peux toujours y parvenir par tes propres moyens. Pourquoi toute aide, dans tous les domaines, devrait-elle toujours venir du gouvernement ou de quelqu'un d'autre? C'est un peu facile de tout mettre sur le dos des institutions et de ne rien faire pour avancer pendant ce temps-là.

"Snap Your Fingers Snap Your Neck"
Ça raconte la vie des gens qui travaillent tous les jours, qui sont déçus en permanence par la vie, mais qui continuent à bosser comme des brutes parce que ça leur donne au moins l' impression de rester en vie. C'est une impression bizarre, c'est la complainte de la vie...

"Cut-Rate"
Celle-là m'a été inspirée par la télévision et les médias américains. Peut-être sont-ils plus ouverts ici, en Europe, mais chez nous, ils te montrent sans arrêt des meurtres à la télé et des tas de violence, mais sans véritable notion de la réalité non plus. Moi , j 'attends qu'ils passent de vraies images de la mort, pas leurs versions épurées et cliniques. Par exemple, tu as un flic qui tue un mec, tu vois le mec porter la main à sa poitrine et mourir en tombant par terre. Dans la réalité, il y aurait eu du sang partout, sa cage thoracique aurait explosé et il se serait tordu de douleur plusieurs heures avant de mourir! Ils ne montrent pas la douleur à la télé, ils ne montrent pas le sang, les organes qui giclent du corps! Quand tu te prends un pruneau en pleine tête, tu ne t'en sors pas avec un petit trou de rien du tout! Ils devraient montrer les choses telles qu'elles sont car aux States, les gosses trouvent ça chouette de tuer et de tirer avec leurs flingues parce qu'ils n'ont aucune notion réelle de ce qu'est la mort.

"Broken Peace"
Ce titre parle de la façon dont tout s'écroule aux States. Les grandes villes sont complètement pourries, crades et invivables. Les gens passent donc leur temps à se plaindre, mais pas un instant ils n'essaient de se serrer les coudes et de résoudre les problèmes. C'est toujours à quelqu'un d'autre de le faire pour eux... Regarde Israël et les Palestiniens, la paix, mon cul! Jamais ils ne seront capables de se dire une bonne fois pour toute qu'ils acceptent leurs différences...

"Out Of This Misery"
C'est encore sur le même thème: on voit tous les jours les gens souffrir autour de nous mais on ne leur tend jamais la main. Nous sommes tous prisonniers de nos propres appartements. Tout le monde se fout de son voisin mais estime que tout lui est dû. Il y a aussi le poids du passé à porter. Aux Etats-Unis, des tas de blacks détestent les blancs parce qu'il y a eu l'esclavage! C'était il y a plus de deux cents ans et on n'était même pas nés mais peu importe, l'excuse est là pour se plaindre un peu plus! Il faut se souvenir du passé mais rien ne sert de vivre dedans non plus.

"No Question"
Ce titre parle des compromis que tu es obligé de faire. Car il faut savoir qu'à chaque fois que tu acceptes un compromis, tu perds quelque chose...

"Not Of This Earth"
Celle-ci est une interrogation sur la mort... Que se passe-t-il ensuite? Qu'y a-t-il derrière? Tout cela est exprimé d'une manière assez vague, je suis sûr que personne n'aurait su que c'était le sujet de la chanson si je ne l'avais pas dit, ah ah!

"Home Rule"
Ce titre parle des groupements de population qui n'arrêtent pas actuellement de revendiquer leur territoire, leur identité. Après la période mondialiste des années 80, les années 90 nous ramènent presque au régionalisme! L'ambiance est très tribale,  en ce moment...

"Sublime"
Ce titre explique que pour s'élever en tant qu'individu, spirituellement parlant, il faut être capable de tout abandonner, de n'avoir aucune attache matérielle d'aucune sorte. C'est sans compromis.

"Test"
Ça part du concept selon lequel tu ne peux pas attendre grand-chose de la vie sur terre. Certains croient encore dans la réalisation personnelle et le bonheur, mais c'est de la connerie! Tu viens sur terre pour t'améliorer en tant de personne, pour progresser en prenant les bonnes décisions et en faisant les bons choix. C'est beaucoup plus important que de se faire plein de frics ou d'être célèbre, ce qui est pourtant l'aspiration de la majorité !