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En 1989, un jeune duo de Bayreuth en Bavière révolutionnait l'univers gothique et le sortait de sa léthargie en fusionnant savamment arrangements symphoniques et architectures électroniques pour en faire le théâtre macabre et poétique d'une obsession autocentrée. Les portes de la deuxième génération goth étaient ouvertes, le champ d'expérimentation immense et les lendemains délicieusement morbides. Dix ans plus tard, Stephan Ackermann (chant) et Bruno Kramm (musique) continuent de mener le radeau Das Ich contre vents et marées avec dans leur sillage, une pléthore de groupes qui leur rendent aujourd'hui hommage au travers d'un double album de remixes, « Re_laborat Re_animat » tout simplement grandiose. L'occasion de feuilleter avec Bruno, l'album souvenir d'une décennie en clair-obscur.
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Bruno Kramm : Il s'est passé beaucoup de choses pour Das Ich durant toutes ces années, nous avons tourné un peu partout, aux Etats-Unis, en Amérique du Sud... C'est fascinant pour nous car la scène dans laquelle nous avons débuté a énormément changé depuis dix ans et il est intéressant de voir toutes ces nouvelles personnes, toutes ces nouvelles influences et de constater que l'esprit est resté le même qu'à l'origine. Je me souviens que lorsque nous avons commencé, la scène allemande était très petite, il n'y avait pas de labels, pas de magazines, il n'y avait presque rien, surtout dans le coin où nous vivions. Nous étions vraiment seuls et les médias ne se gênaient pas pour balancer des vannes sur le mouvement goth du style "Les gamins suicidaires, etc". Tout ceci a changé à présent avec le réseau gothique-électro, tout est devenu plus facile et on aurait été bien contents, à l'époque de nos premiers disques, d'avoir les mêmes chances que les groupes d 'aujourd'hui. Mais c'est génial que cette scène devienne de plus en plus importante, de pouvoir facilement lire dans Elegy ce qui se passe en France, ou dans Zillo et Orkus ce qui se passe en Allemagne, et de former tous ensemble cette sorte d'espace européen.

Comment considères-tu votre évolution depuis « Satanische Verse » jusqu'à cet album de remixes ?

Nous nous sommes tout d'abord améliorés d'un point de vue technique. Nous sommes également l'un des groupes à expérimenter le plus entre chaque album, pour qu'aucun d'entre eux ne ressemble à quelque chose que l'on ait déjà fait auparavant: Si tu écoutes « Egodram », puis « Morgue » et aujourd'hui « Re_laborat », tu constateras que ce sont trois trucs tout à fait différents. Mais, par exemple, un groupe comme Project Pitchfork, tu mets ensemble deux chansons extraites de deux albums différents, elles sont pareilles! Ne pas se répéter, voilà la chose la plus importante pour nous et ce, depuis le début.

Bilan oblige, revenons sur vos principaux disques. « Satanische Verse » (1990)...

Cela a été pour nous comme une borne, car nous avions eu auparavant beaucoup d'expériences avec d'autres groupes et lorsque nous avons enregistré « Satanische Verse », il a aussitôt représenté la définition que l'on avait de Das Ich. Et il a bien percé en Allemagne. A la base, ce n'était qu'une simple démo et ce n'est qu'après que le distributeur nous a proposé de le ressortir en CD. Le titre, lui, emprunté au livre de Salman Rushdie, a été choisi car il avait la même signification pour les chrétiens et pour les musulmans, c'était une sorte de provocation.

Das ich pgoto 1999

« Die Propheten » (1991)...

Cet album est un peu similaire à « Satanichse Verse » car il contient certains titres de la démo réenregistrés dans de meilleures versions. Nous avons essayé avec « Die Propheten » d'approfondir le concept de la démo, un concept basé sur la religion, le christianisme, et tenté de trouver plus de réponses à la critique que nous en faisions.

« Staub » (1993)...

C'est un album plus profond et plus sombre que « Die Propheten », avec moins de clichés. C'est notre œuvre la plus dépressive car, à cette époque, nous avions pas mal de problèmes personnels avec nos copines, mon label Danse Macabre rencontrait de grosses difficultés financières et tout semblait aller de travers. Nous étions complètement déprimés, frustrés et cela se ressent dans l'ambiance de ce disque. Nous étions sortis de la religion pour aborder la société moderne et ses changements, la transformation des systèmes physiques en systèmes chaotiques, les problèmes d'environnement, bref un millénaire apocalyptique...

L'album d'Atrocity « Die Liebe » (1995)...

On s'est bien amusés en le faisant, mais on ne s'est pas tant impliqués dedans. Pour nous c'était plus une collaboration. Cela a un peu été le lancement du crossover allemand entre gothique et métal, ce qui n'était pas très populaire à l'époque. Quand il est sorti, beaucoup de gens ont dit : "Oh mon Dieu, qu’ont-ils fait là, travailler avec un groupe de métal, comme c'est obscène!", Aujourd'hui c'est presque normal de mélanger les deux, mais je pense que c'était un peu trop tôt pour l'époque.

La bande originale du film Das ewige Licht de H.-H. Hässler, « Das innere ich » (1996)... 

Ce fut une expérience très intéressante de réaliser une B.o. de film, car nous faisons toujours de la musique pour les films qui sont dans nos têtes et, cette fois, on nous a donné le film pour en faire de la musique. Ils voulaient quelque chose qui ne soit pas trop orienté chanson mais plus ambiant et atmosphérique et cela nous a beaucoup amusés de le faire ainsi. Le seul problème, c'est que l'on n'a eu que deux semaines pour l'enregistrer et on a donc pas mal stressé. Mais ce film n'est passé en Allemagne que dans certains cinémas que l 'on appelle" Program Kinos " et il n'a malheureusement que peu de chance de voir le jour en France en vidéo.

« Egodram » (1997)...

Ce fut la première fois que l’on décidait réellement de faire un album sans concept ni grande philosophie derrière, quelque chose sur lequel les gens aimeraient danser, ce qui, là encore, était très intéressant et nouveau pour nous. Mais au final, je ne pense pas que ce la soit un disque véritablement "dancefloor", Das Ich étant bien meilleur pour faire plutôt une musique spirituelle que corporelle.
C'est vrai que Egodram peut paraître quelque peu commercial du fait de ce côté dansant, mais il faut savoir que cela n'a rien à voir avec notre label d'alors, Edel (que l'on a quitté juste après), le disque étant déjà terminé au moment de la signature. Pour nous, « Egodram » n'était qu'une expérimentation de plus.
 


 

« Morgue » (1998)...

C'est un album basé sur les poèmes d'un célèbre écrivain allemand, Gottfried Benn, que l'on pourrait comparer à Baudelaire en France. Ces textes sont remplis d'atmosphères très profondes et ce personnage fut l'une de nos premières inspirations lorsque nous avons commencé à écrire nos textes en allemand. Le temps était venu pour nous de faire ce disque, afin de présenter ce que furent les racines de Das Ich et il en ressort un album qui se rapproche de nos premiers travaux, très sombre, très gothique.

Et enfin aujourd'hui il y a « Re_Laborat Re_animat »; pourquoi avoir choisi de célébrer vos dix ans avec un album de remixes plutôt qu'avec une simple compilation?

Parce que je pense qu'une compilation est toujours plus ou moins un moyen pour se faire de l'argent. D'autre part, on n'a jamais fait faire de remixes de nos morceaux dans le passé, tout simplement parce que l'on craignait que les remixeurs n'aient aucune idée de la manière dont on voulait entendre ces morceaux sonner. Puis on s'est finalement dit qu'il serait intéressant pour la première fois de notre carrière de laisser nos chansons entre les mains d'autres personnes et, pourquoi pas, d'en faire un album, quelque chose de spécial pour notre anniversaire. J'espère que les gens aimeront ce double CD, il est très dansant et parfait pour les soirées!

Comment s'est opéré le choix des remixeurs?

Les premières personnes que nous ayons contactées ont été notre vieil ami Steve Naghavi d'And One et Ernst Horn de Deine Lakaien et en fait, après cela, tous les autres groupes nous ont téléphoné pour nous demander: "Eh, voulez-vous que l 'on fasse aussi un remix pour vous, etc. " c'était très drôle!

A l'arrivée, c'est une sorte de tribute à Das lch ? Vous devez être flattés...

Oui, nous sommes vraiment très heureux de voir tous ces groupes nous remixer. Cela nous a, de plus, donné l'occasion d 'entrer pour la première fois en contact avec des gens comme Funker Vogt ou :Wumpscut: et nous avons maintenant pleins de nouveaux amis!

Quel est le remix qui te semble le plus réussi?

Pas facile... Ce ne serait pas très correct de ma part de dire lequel de ces remixes est mon favori car tous ces groupes ont vraiment fait un gros travail. Je dirais néanmoins que j'aime beaucoup le remix de Laboratory X (NDLR : Groupe de Chad Blinman de Faith & The Muse) ainsi que celui d'And One, notamment parce que c'est Steve qui chante dessus.

Justement, Stephan n'a-t-il pas trop tiqué de se faire remplacer par un autre sur ce titre?

C'est un remix. Cela ne me pose pas de problème pour ma musique, pourquoi cela en poserait-il à Stephan au niveau du chant?

Pour conclure, quel est le souvenir le plus fort qui ait marqué ces dix ans avec Das lch?

C' était un concert à New York, lors du Procession Tour (NDLR : 1994) avec Faith & The Muse, Rosetta Stone et Corpus Delicti. C'était dans un club, le Limelight, qui en fait est une vieille église et nous y avons joué devant environ 1500 personnes; on se sentait comme des prêcheurs tant l'ambiance était fantastique...